Partager la publication "Audi Sport quattro : du Groupe 4 au Groupe B en championnat de rallye en passant par Pikes Peak"
Le Coupé quattro ouvre le rallye du Portugal de l’Algarve 1980 avec numéro zéro mais, déjà, on s’aperçoivent que l’Audi est un phénomène qui va bouleverser pour toujours le monde des rallyes. 4 roues motrices, un moteur turbo et une équipe de grands pilotes (Michèle Mouton, Mikkola, Blomqvist, puis Röhrl en 1984), telle est la recette du succès. A l’issue de sa deuxième saison complète en 1982, Audi est champion du monde. En 1983, le titre constructeur échappe à Audi, battu par une équipe Lancia mieux organisée avec sa redoutable « 037 » à moteur central. Mais Audi va revenir encore plus fort en 1984 avec la Sport quattro ! Découvrons cette histoire de tout d’un pan de l’automobile sportive de compétition.
Audi quattro en rallye
…qui fait suite à la présentation civile de l’Audi quattro : de l’origine ,ur-quattro’ 4-Wheel Drive turbo.
L’Audi quattro a, dès le début de sa conception, été prévue pour courir en rallye. En effet, les quatre roues motrices permanentes sont un avantage indéniable sur les routes à faible adhérence que l’on rencontre dans les épreuves de rallye quand la quasi-totalité des véhicules qui concourent sont des propulsions tels que Talbot Sunbeam Lotus, Opel Ascona 400 ou encore Renault 5 Turbo, voire des tractions avec la Renault 5 Alpine.
Avant de présenter les automobiles sportive Audi, faisons le point sur les Groupes dit numérotés, ou à lettre, de la FIA. Essentiel pour connaitre le contexte et les intentions des constructeurs.
…du Groupe 4 au Groupe B en championnat de rallye
Histoire de Groupes numérotés de la FIA
Les groupes numérotés de la FIA étaient présentés dans l’annexe J du règlement de la Fédération internationale de l’automobile (FIA – entité chargée de réguler les compétitions automobiles) de 1961 à 1982 ; ils définissaient différentes catégories de voitures de course.
En 1961, l’annexe J du règlement de la FIA stipule les déclinaisons de groupes suivants :
Catégorie A – Tourisme
- Groupe 1 : Voitures de Tourisme de Série
- Groupe 2 : Voitures de Tourisme de Série évoluées
Catégorie B – Grand Tourisme
- Groupe 3 : Voiture de Grand Tourisme
Catégorie C – Voitures de Sport
- Groupe 4 : Voitures de Sport
En 1969, l’annexe J du règlement FIA donne une précision quant aux nombres minimum de voitures devant être construites en douze mois consécutifs.
Catégorie A – Voitures de production homologuées
- Groupe 1 : Voitures de Tourisme de Série (5000 exemplaires)
- Groupe 2 : Voitures de Tourisme (1000 exemplaires)
- Groupe 3 : Voitures de Grand Tourisme (500 exemplaires)
- Groupe 4 : Voitures de Sport (25 exemplaires)
Catégorie B – Voitures spéciales
- Groupe 5 : Voitures de tourisme spéciales
- Groupe 6 : Voitures de sport-prototypes
Catégorie C – Voitures de course
- Groupe 7 : Voitures de course strongi-places
- Groupe 8 : Voitures de course de formule
- Groupe 9 : Voitures de course listrongre
En 1971, le groupe 2 est renommé « Voitures de tourisme spéciales » et le groupe 4 « Voitures de grand tourisme spéciales ». Le groupe 5 fait dorénavant partie de la catégorie A. La dénomination de la catégorie B devient « Voitures de compétition expérimentales ».
En 1975, les catégories 8 et 9 seront renommées respectivement en « Voitures de formule Internationale » et « Voitures de formule libre ». De plus le groupe 6 est supprimé et la catégorie B contient maintenant le Groupe 5 uniquement.
Soit pour récapitulatif en 1975 :
Catégorie A – Voitures de production homologuées
- Groupe 1 : Voitures de Tourisme de Série (5000 exemplaires)
- Groupe 2 : Voitures de Tourisme spéciales (1000 exemplaires)
- Groupe 3 : Voitures de Grand Tourisme de Série (1000 exemplaires)
- Groupe 4 : Voitures de Grand Tourisme spéciales (500 exemplaires)
Catégorie B – Voitures de compétition expérimentales
- Groupe 5 : Voitures de sport
Catégorie C – Voitures de course
- Groupe 7 : Voitures de course strongi-places
- Groupe 8 : Voitures de formule Internationale
- Groupe 9 : Voitures de formule listrongre
En rallye, les constructeurs étaient surtout engagés en Groupe 2 et Groupe 4 comme Lancia avec la Stratos, Ford avec l’Escort, et Fiat avec la 131 Abarth.
Audi quattro Groupe 4
La première version rallye de l’Audi quattro est engagée en catégorie groupe 4 nécessitant au minimum 500 exemplaires de la version de série. Ce qui devait être la limite de production de la voiture de série mais son succès a permis de la produire finalement à plus de 14 000 exemplaires.
Les modifications sont assez nombreuses, ainsi la voiture perd son différentiel central pour disposer d’une répartition fixe de 50 % sur chaque essieu pour favoriser la fiabilité, la motricité et la maniabilité sur terrain glissant.
Au niveau de la carrosserie, les ailes sont remplacées par des éléments en aluminium puis en kevlar tout comme les capots et les vitrages — hormis le pare-brise — sont remplacés par des pièces en polycarbonate. Les différentes opérations permettent d’alléger la voiture à un poids d’environ 1 100 kg soit 200 kg de moins que la version de série.
L’intérieur est vidé de tous éléments de confort et reçoit un arceau soudé qui améliore la sécurité des occupants mais aussi la rigidité de la caisse. Dans la même optique, des renforts en aluminium font leur apparition, notamment des barres anti-rapprochement.
Au niveau de la motorisation, le moteur reçoit un turbocompresseur 3K plus gros que d’origine, l’échangeur de température est plus grand et disposé derrière la calandre et l’injection Bosch K-Jetronic est remplacée par une injection Pierburg. La puissance passe ainsi à environ 360 ch. C’est 160 ch de puissance de plus que d’origine.
Pour la version ‘Quattro A1′, le moteur dispose dorénavant d’un bloc-cylindres en aluminium pour alléger le train avant, quelques modifications font monter la puissance à environ 380 ch.
L’automobile sportive Audi Quattro A2 est la première Audi quattro homologué en groupe B c’est la quattro la plus titré.
FIA Groupe B
Le Groupe B est la catégorie relative aux voitures de Grand Tourisme modifiées et produites à 200 exemplaires, dans le règlement de la FIA. Cette catégorie est créée en 1982 pour remplacer les anciennes catégories Groupe 4 et Groupe 5.
Cette catégorie marqua particulièrement le Championnat du monde des rallyes où les véhicules atteignaient des records de puissance pour la discipline, jusqu’à 600 chevaux pour l’Audi quattro Sport E2.
Certaines de ces voitures possédaient aussi 4 roues motrices plus adaptées aux rallyes de l’époque.
Pour être autorisé à courir en Groupe B, un modèle devait être produit à au moins 200 exemplaires en un an par son constructeur. Le constructeur pouvait alors engager une vingtaine de voitures par an, nommées ‘Evolution’, strictement réservées à la compétition. Le nombre passera à dix voitures en 1986.
Le remplacement de ces catégories numérotés est annoncé le 1er janvier 1978 aux constructeurs. Ceux-ci sont officiellement informés qu’ils disposent de 5 années pour concevoir et préparer de nouveaux véhicules en adéquations avec les futurs groupes :
- N : voitures de tourisme modifiées (remplaçant du groupe 1)
- B : voitures de grand tourisme modifiées (remplaçant des groupes 4 et 5)
- A : voitures de production (remplaçant du groupe 2)
Ceux-ci entreront en vigueur le 1er janvier 19832, les prototypes étant acceptés en 1982.
En 1982, seules les marques Citroën et Lancia s’engagent sous la réglementation Groupe B, Audi remportant le championnat des constructeurs avec sa Quattro groupe 4, Röhrl le championnat pilotes avec une Opel Ascona 400, groupe IV également.
L’année 1983, première année effective du groupe B en Championnat du monde des rallyes, est marquée par la domination de l’Audi quattro A1/A2 et Hannu Mikkola fut champion du monde pilote. Mais le manque de régularité de celle-ci permit à Lancia et sa Lancia Rally 037 de gagner le titre constructeurs.
La Lancia Rally 037 était encore une propulsion, car le constructeur ne faisait pas assez confiance à la technologie quatre roues motrices. Opel et Toyota, entre autres, rejoignirent le Groupe B.
En 1984 Audi réalisa le doublé et ravit donc les deux titres. Le pilote suédois Stig Blomqvist fut champion. Mais cette année-là, au Tour de Corse un concurrent, qui va contrarier les plans d’Audi par la suite, apparaît. Il s’agit de Peugeot qui se lançait en Groupe B avec la Peugeot 205 Turbo 16. Le constructeur se donna les moyens de ses ambitions et engagea de grands noms du sport automobile comme Ari Vatanen et Jean Todt, le succès fut quasi immédiat.
L’année 1985 est donc logiquement marquée par la domination de Peugeot et de sa 205 plus petite et légère que ses concurrentes.
La nouvelle quattro souffrait à nouveau de problèmes de régularité et la Lancia Rally 037 n’était plus en mesure de rattraper son retard technologique. Peugeot réalisa donc à son tour le doublé, Timo Salonen succédant à Stig Blomqvist.
En 1986, Audi sortait la dernière évolution de la quattro, la E2, qui faisait plus de 500 ch et avait un package aérodynamique imposant pour pouvoir la maintenir au sol.
Lancia disposait d’une nouvelle voiture, la Delta S4, avec un moteur à double suralimentation (turbo + compresseur).
Peugeot avait les armes pour défendre son titre avec la 205 Turbo 16 Evo 2 et enfin Ford avait ses chances avec une RS200 à la pointe de la technologie.
Mais ce qui devait arriver arriva : le nombre toujours plus important de spectateurs massés sur les bords de pistes finit par provoquer une catastrophe. Lors du Rallye du Portugal, la Ford RS200 de Joaquim Santos percuta la foule, ce qui entraîna la mort de trois spectateurs et des dizaines de blessés. Les équipes de pointe quittèrent le rallye, refusant de courir avec tant de spectateurs sur les spéciales.
Mais le coup fatal pour le Groupe B était encore à venir, avant son bannissement en mai 1986, avec effet au 1er janvier 1987.
Lors du Tour de Corse, Henri Toivonen, alors en tête du rallye, quitta la piste et plongea dans un ravin avec sa Lancia Delta S4. Le réservoir explosa au contact des arbres et des rochers, Toivonen et son copilote Sergio Cresto moururent tous deux un an jour pour jour après Attilio Bettega.
L’intervention des secours fut tardive car il n’y avait aucun spectateur à cet endroit et on mit du temps à se rendre compte que quelque chose était survenu. L’incendie fut si violent qu’il ne subsista de la Lancia que son châssis tubulaire.
Les conséquences furent immédiates. Audi et Ford quittèrent la scène du Groupe B, et la FISA (Fédération Internationale du Sport Automobile) prit aussitôt les mesures suivantes lors du comité extraordinaire du 3 mai 1986 :
- arrêt immédiat de l’homologation de toute nouvelle évolution des voitures des groupes A et B ;
- interdiction des jupes à partir du 20 mai 1986 ;
- limitation de la durée des étapes par limitation du kilométrage ;
- obligation d’équiper les voitures de groupe B d’un système automatique d’extinction d’incendie ;
- à compter du 1er janvier 1987, annulation du futur groupe S, interdiction des voitures de groupe B à l’exception des modèles de moindre puissance, interdiction de certains matériaux dans la construction des voitures et championnat du monde des rallyes réservé aux voitures du groupe A (5000 exemplaires minimum).
La fin de saison ne fut pas sans controverse. Les Peugeot furent disqualifiées au Rallye Sanremo par les commissaires italiens pour des « jupes » jugées illégales, l’équipe Peugeot cria au scandale et dénonça une décision pour favoriser Lancia. Lors du Rallye de Grande-Bretagne, les commissaires jugèrent la voiture conforme alors qu’elle était dans le même état, ce qui conforta les accusations de Peugeot.
Onze jours après le dernier rallye de cette saison, aux États-Unis, la FISA annula le résultat du Sanremo et le titre pilotes passa alors du pilote Lancia Markku Alén au pilote Peugeot Juha Kankkunen. Peugeot signa donc finalement un deuxième doublé consécutif.
Par la suite,
FISA Groupe S
La FISA veut créer une nouvelle catégorie pour 1987 qui devra supplanter le Groupe B, celle-ci est baptisée Groupe S. La FISA veut encourager les designs innovants et futuristes mais limiter la puissance, elle adapte donc les règles en conséquence :
- Homologation : dix exemplaires (une seule demande par an, réservée aux grands constructeurs)
- dimensions maximales : 4,5 m x 1,9 m
- masse minimum : 1 000 kg
- diamètre maximal des jantes : 16 pouces
- largeur maximale des jantes : 18 pouces
- crash-test obligatoire
- cylindrée maximale : 2400 cm3 (moteur atmosphérique) ou 1200& cm3 (moteur suralimenté), avec bride limitant l’admission d’air
Lancia fait construire la Lancia ECV (pour Experimental Composite Vehicle) qui développe 600 ch grâce à un moteur turbo-compressé nommé Triflux à cause des trois conduits d’air séparée. La voiture fait un large usage des matériaux composites comme le Kevlar et la fibre de carbone pour gagner du poids et résistance.
Lassé des difficultés de la Celica sur les épreuves européennes, Toyota lance en 1985 le projet 222D sur la base d’une MR2 en vue du groupe S. La voiture, prête pour la course, pèse environ 750 kg et est équipée d’un moteur turbo transversal à quatre cylindres développant 750 ch.
Audi planifie une voiture nommée Sport quattro RS 002. Le projet fut abandonné à la suite de la disparition du Groupe B et du retrait d’Audi en rallye. Il affiche 12 km au compteur et ne fut jamais testé.
Mais à la suite du tour de Corse 1986, le Groupe B est banni et il entraîne dans sa chute le Groupe S.
La sous-catégorie du Groupe A, la catégorie WRC (pour World Rally Championship) par World Rally Teams Association, est créée en 1997 par la FIA, comme en quelque sorte la renaissance du Groupe S. En effet, la limitation de puissance est de 300 ch et le nombre minimal de voitures à produire est de vingt mais contrairement au Groupe S les voitures de compétition doivent partager des pièces en commun avec celles de production.
Les débuts du Rallycross
Dès 1987, de nombreuses groupe B comme la 205 Turbo 16 Evo 2, la Delta S4, la Ford RS200, l’ Audi quattro Sport E2 ou la Métro 6R4 s’engagent dans le championnat d’Europe de rallycross en division 2.
Les débuts du Rally-raid
Privée d’une catégorie de rallye acceptant la 205, Peugeot décide de s’orienter vers le rallye raid, et principalement le Paris Dakar. En 1987, la 205 T16 « Grand Raid » adaptée aux conditions difficiles des raids gagnera « facilement », aux mains de Ari Vatanen, le Dakar et le rallye des Pharaons en Égypte, face, il est vrai, à une concurrence faible par rapport à celle des années de rallye.
L’édition suivante du Dakar sera aussi remportée par la 205 pilotée par Juha Kankkunen, celle pilotée par Alain Ambrosino termine 6e.
En 1989, elle est remplacée par la Peugeot 405 Turbo 16 mais deux 205 T16 sont encore engagées, dont celle pilotée par Guy Fréquelin (link CM) qui finit la course en 4e position.
Les débuts de Pikes Peaks
Parallèlement au championnat du monde des rallyes, Audi engagea la première voiture en 1982, une quattro, confiée à John Buffum, d’Audi of America. Il s’impose deux fois, en 1982 et 1983, dans la division Open Rally.
En 1984 c’est à Michèle Mouton qu’une quattro est confiée. Elle prend la tête de sa catégorie mais ne parvient pas à s’imposer au classement général, elle décroche la seconde place sur le podium. Les américains lui prodiguent des encouragements et lui proposent de revenir l’année suivante. Elle s’attaque à nouveau au record de la piste en 1985. Aux essais, il lui est reproché d’avoir chauffé ses pneus avant de s’élancer, comme il est d’usage en rallye. Elle signe les meilleurs temps des essais. Le jour de la course, elle part en dernière position (meilleurs essais) dans sa Sport quattro et remporte la course, établissant un nouveau record avec 11 min 25 s 39, améliorant le temps précédent de 13 secondes. Michèle Mouton établit ainsi une triple performance : record de la piste, première victoire d’un non-américain dans cette compétition et première victoire d’une femme pilote.
Pour 1986, Audi confie sa voiture à l’américain Bobby Unser, déjà huit fois vainqueur de cette épreuve et trois fois vainqueur des 500 miles d’Indianapolis. À bord de la Quattro Sport E2, il remporte la victoire ainsi que le record de la montée en 11 min 9 s 22, soit 16 secondes de moins que Michèle Mouton l’année précédente.
En 1987, après le succès du Dakar, Jean Todt s’intéresse à Pikes Peak. Trois 205 t16, considérées comme l’évolution 3 du modèle, sont engagées, avec à leur volant Ari Vatanen, Shekhar Mehta et Andrea Zanussi. La voiture développe 550 chevaux pour 850 kilos, avec des ailerons hypertrophiés. Mais ce sera Walter Röhrl qui gagnera l’épreuve en passant pour la première fois sous les 11 minutes, en 10 min 47 s 85. Vatanen finit deuxième, à 7 secondes de l’Audi, résultat qui selon lui est dû à la rupture d’un collier d’une Durit de suralimentation8.
La 205 sera remplacée victorieusement les années suivantes par la 405 T16, qui, sous l’apparence du nouveau modèle Peugeot, conservait en grande partie la mécanique de la 205 et Vatanen remportera la course en 1988.
Les débuts en Rallye
Alors qu’en 1984, Audi est à nouveau champion du monde des rallyes, titre constructeurs. Stig Blomqvist remporte le titre pilote. La marque aux anneaux est LA référence de ce millésime 1984.
« L’Audi Quattro de Walter Röhrl et Christian Geistdorfer, les futurs vainqueurs, portait le numéro 1. Elle déboula à une vitesse ahurissante, terrifiante d’efficacité, dans le grondement sourd de son 5 cylindres turbocompressé. La Quattro respirait la force, comme un boxeur poids lourd au sommet de sa forme. La Quattro, c’était la réunion chez un même athlète de la puissance brutale de Tyson, de l’agilité d’Ali, et de la hargne de Cerdan. En janvier 1984, les Audi étaient les seules 4 roues motrices en groupe B. La 205 T16 n’était pas encore engagée en compétition par Peugeot. La Delta S4 non plus, pas plus que la MG Metro 6R4 qui ne serait présentée à la presse que quelques semaines plus tard. »
« Sur neige et sur glace, les Audi s’annonçaient imbattables. Elles rempliraient leur contrat en monopolisant le podium à l’arrivée. Derrière Walter Röhrl – Christian Geistdorfer qui remportaient leur 4ème Monte-Carlo après avoir déjà gagné sur Fiat 131 Abarth, Opel Ascona 400 et Lancia 037 Rally, Stig Bomvist – Bjorn Cederberg et Hannu Mikkola – Arne Hertz complèteraient le triomphe Audi en se classant respectivement seconds et troisièmes »
- Thierry Le Bras, auteur, ancien pilote
Extrait de CIRCUITMORTEL.com
Pour donner la réplique à une Peugeot 205 turbo 16 de plus en plus menaçante, Audi sort en Corse son arme absolue, la Sport quattro. Homologuée en avril 1984, à la même date que le 205, elle est confiée à Walter Röhrl.
Design de l’Audi Sport quattro
Après concertation avec les pilotes, le cahier des charges est défini par la direction Audi. Mais en dépit des critiques de certains pilotes qui reprochent à l’auto son caractère trop sous-vireur, à Ingolstadt on s’attache à conserver pour les voitures de compétition une architecture proche de celle des modèles de série, cela afin que les clients assimilent au maximum leurs voitures à celles qui gagnent en rallye.
Donc, tandis que les autres constructeurs adoptent en masse le moteur central arrière – Peugeot 205 T16, Lancia 037, Ford RS200, Metro 6R4 notamment – Audi persiste avec son coupé à moteur en porte-à-faux avant mais entend bien s’adapter au mieux au règlement du Groupe B.
Afin d’augmenter l’agilité de la voiture et de réduire son poids, la carrosserie de la nouvelle Sport quattro est en grande partie réalisée en Kevlar. Elle repose sur un châssis de ur-quattro dont l’empattement a été réduit de 32 cm.
==> Audi quattro : de l’origine ,ur-quattro’ 4-Wheel Drive turbo jusqu’à ,quattro GmbH’
Le coupé Audi Sport quattro de série est évidemment loin du poids minimum autorisé en compétition avec ses 1300 kg, mais les performances de cette véritable voiture de course en tenue bourgeoise ont de quoi faire fantasmer le public de l’époque.
Conçu explicitement pour les besoin de la compétition en 1984, le coupé Sport quattro est presque une toute nouvelle voiture tant les modifications techniques sont importantes.
Design intérieur de l’Audi Sport quattro
Moteur de l’Audi Sport quattro
La Sport Quattro, version civile, offre 306 ch de puissance obtenus du 5 cylindres de 2,1 litres, 20 soupapes, avec turbo.
Doté d’un nouveau bloc en alliage d’aluminium, le 5 cylindres Audi (type KW) se coiffe de plus d’une inédite culasse ‘crossflow’ à 2 arbres à cames et 4 soupapes par cylindre.
Avec son gros turbo K27, le coupé Audi Sport quattro délivre une puissance de 306 chevaux et adopte une boîte de vitesses à six rapports.
Le Sport quattro de série est évidemment loin du poids réglementaire avec ses 1300 kg, mais les performances de cette véritable voiture de compétition restent admirables grâce à un rapport poids/puissance avantageux de 4,4 Kg/ch.
Parmi ses contraintes, le coefficient turbo fixé à 1,4 conduit Audi à ramener la cylindrée à 2133 cm3 pour rester dans la catégorie des 3 litres et bénéficier d’un poids minimum de 960 kg, comme la 205 T16, contre 1100 kg précédemment. Doté d’un nouveau bloc en alliage d’aluminium chemisés, le 5 cylindres Audi de la Sport quattro est coiffé d’une nouvelle culasse ‘crossflow’ à 2 arbres à cames et 4 soupapes par cylindre.
La culasse est de forme particulièrement étroite, l’angle des soupapes n’étant que de 25°. Les deux arbres étant très proches, la came d’admission peut être entraînée, par l’intermédiaire de deux pignons à denture oblique, par la came d’échappement, elle-même entraînée par une courroie crantée. La bougie se trouve exactement au centre, entre les quatre soupapes et c’est la première fois que les soupapes sont disposées de façon asymétrique sur une culasse à quatre soupapes par cylindre.
L’ensemble de l’allumage et de l’alimentation est géré par la nouvelle injection électronique Bosch LH Jetronic. Le taux de compression est de 8:1. Avec son gros turbo 3K K27 soufflant à 1,05 bars, le coupé Audi Sport quattro délivre une puissance de 306 chevaux et un couple de 350 Nm dans sa version route. Le turbo possède son propre circuit d’huile et et des paliers refroidis par eau.
Grâce à un rapport poids/puissance avantageux de 4,4 Kg/ch qui compense un piètre Cx de 0,48, la Sport quattro abat le 0 à 100 km/h en 4,9 secondes, vitesse de pointe à 249 km/h
En 1985, la bataille fait rage entre Audi et Peugeot. La marque française sort vainqueur du duel quand elle remporte les deux titres avec Timo Salonen et le titre constructeur.
Audi place tout de même ses pilotes Stig Blomqvist et Hannu Mikkola aux deuxième et troisième place. L’Audi quattro S1, avec son pare-choc avant et aileron arrière surdimensionnés marque tous les esprits.
Pendant ce temps, au Mont-Dore en 1985, une Audi Quattro groupe B en course de côte ! raconté sur CIRCUITMORTEL.
Parallèlement aux Etat-Unis, en 1985, la pilote française Michèle Mouton remporta la course de montagne américaine de Pikes-Peak. Les quelques 23 victoires en seulement 5 ans firent de l’Audi quattro la plus performante voiture de rallye jamais produite depuis les débuts de la coupe du monde. Par la même occasion, la version civile de ce monstre sacré des rallyes devenait un objet de culte absolu.
Histoire de Pilote Michèle Mouton
En 1981, Michèle Mouton, âgée de 30 ans, est alors repérée par la firme allemande Audi, qui lui fait tester la nouvelle quattro Sport groupe 4 (futur Groupe B dès 1983).
Pour cette saison, Michèle Mouton est engagée pour seconder Hannu Mikkola dans sa conquête du titre mondial. Michèle Mouton remporte le San Remo et devient ainsi la première (et unique) femme de l’histoire à remporter une manche du Championnat du monde des rallyes.
En 1982, ils seront rejoints par le brillant pilote suédois Stig Blomqvist. Michèle remporte encore trois rallyes du Championnat du monde : le rallye du Portugal, le rallye de l’Acropole (Grèce) et du Brésil.
L’Audi étant toujours davantage plus au point, l’année commence fort avec une seconde place au Monte-Carlo pour Hannu Mikkola qui sera suivie de deux victoires, en Suède pour Stig Blomqvist et au Portugal pour Michèle Mouton.
Le reste de la saison est à l’avenant : victoires d’Audi au rallye des mille lacs, au San Remo et au RAC Rally in Great Britain. La malchance a joué en fin de saison pour Michèle puisqu’elle ratera de peu le titre pilotes, principalement lors de l’avant-dernière épreuve en Côte d’Ivoire, quand elle apprend, la veille du départ, le décès de son père.
Cependant, grâce à la régularité de ses trois pilotes, Audi empoche le titre constructeurs et Michèle est vice-championne du Monde.
Walter Röhrl, Champion du monde en 1980 et 1982, rejoindra l’équipe en 1984. Dès la seconde épreuve de la saison en Suède, la toute puissante armada allemande fait main basse sur les trois premières places avec, dans l’ordre, S. Blomqvist, M. Mouton et P. Eklund.
Le même scénario se répète au Portugal, à l’Acropole, en Nouvelle-Zélande, Argentine et Côte d’Ivoire.
Michèle Mouton fera cette année une demi-saison après les nombreuses saisons passées à écumer les routes et les pistes du monde entier, tant pour le compte de Fiat que celui d’Audi. Cela ne l’empêchera pas de terminer en tête de la catégorie Rallye, et surtout deuxième scratch au fameux Pikes Peak International Hill Climb, cette course de côte mythique du Colorado, appelée également « La course vers les nuages » de l’anglais ‘The race to the clouds’.
En 1985, elle bat tous les records de cette course et la remporte pour Audi avec le trophée ‘Pikes Peak Rookie of the Year award’.
En 1986, après un titre de championne d’Allemagne avec Peugeot Talbot Deutschland (copilote l’anglais Terry Harryman), et l’annonce durant le Tour de Corse de la fin des voitures du groupe B, Michèle Mouton décide de mettre un terme à sa carrière. Première femme pilote professionnelle, elle aura totalisé 229 points en 50 courses WRC, étalées sur 14 années.
Audi quattro Sport E2 Pikes Peak
L’Audi quattro Sport E2 (appelée aussi Audi S1) est une évolution de la quattro Sport.
Ce modèle est un quattro E2 modifié spécialement pour la course de Pikes Peak. Ce véhicule est le même E2 (avec quelques évolutions mécaniques et aérodynamiques) que celui utilisé par Bobby Unser Sr, un an auparavant. Il n’a été utilisé que pour ces deux courses de Pikes Peak. L’identification officielle de ce E2 est : IN-YC 64. Il a été enregistré le 23 avril 1986.
Extérieurement, ce véhicule se différencie du E2 par ses ailerons avant et arrière imposants (les derniers modèles de E2 possédaient un aileron arrière équivalent). Ces ailerons permettent d’obtenir un maximum d’appui au sol, surtout à l’avant, car le moteur développe 598 ch et la voiture a tendance se cabrer.
S1 Pikes Peak: Härtetest in der Höhenkammer S1 Pikes Peak: Härtetest in der Höhenkammer
Audi à Pikes Peak
Cette course se déroule sur un chemin et non sur asphalte, qui de plus est incliné. Les conditions d’appui sont ainsi particulières à cette course, où beaucoup de véhicules sont dotés d’ailerons imposants.
Intérieurement, la voiture a été allégée au maximum (les portes sont en fibre de verre). Le moteur développe 598 ch pour un couple de 670 Nm à 5500 tr/min, contre 476 ch pour un E2 de base. Cette puissance est utilisée pour fournir une puissance et une reprise importantes.
La course automobile de Pikes Peak est une course de côte emblématique et les ‘Open Wheel’, des monoplaces équipées de V8 gonflés, en sont les reines de l’épreuve.
En 1981, la Direction de course décide d’ouvrir l’épreuve aux voitures de rallyes en créant la catégorie Open Rally.
Audi profite de l’occasion pour tenter de soutenir sa gamme commerciale en prouvant l’efficacité de ses voitures face à la meilleure opposition qui soit.
En 1982, une Audi quattro est confiée à John Buffum, d’Audi of America, pour mener la première campagne. Il s’impose deux fois, en 1982 et 1983, dans la division Open Rally.
En 1984, c’est à Michèle Mouton qu’une quattro est confiée. Elle prend la tête de sa catégorie mais ne parvient pas à s’imposer au classement général ; elle décroche la seconde place sur le podium. Les Américains lui prodiguent des encouragements et lui proposent de revenir l’année suivante.
En 1985, Michèle Mouton s’attaque à nouveau au record de la piste. Aux essais, il lui est reproché d’avoir chauffé ses pneus avant de s’élancer, comme il est d’usage en rallye. Elle signe les meilleurs temps des essais. Le jour de la course, elle part en dernière position (meilleurs essais) dans sa Sport quattro et remporte la course, établissant un nouveau record avec 11 min 25 s 39, améliorant le temps précédent de 13 secondes.
Michèle Mouton établit ainsi une triple performance : record de la piste, première victoire d’un non américain dans cette compétition et première victoire d’une femme pilote.
Audi, pour la campagne suivante en 1986, confie sa voiture à l’américain Bobby Unser, déjà 8 fois vainqueur de cette épreuve et 3 fois vainqueur des 500 miles d’Indianapolis. À bord de la Sport quattro E2, il remporte la victoire ainsi que le record de la montée en 11 min 09 s 22, soit 16 secondes de moins que Michèle Mouton l’année précédente.
La longue carrière de l’Audi Quattro se termine en 1991, après avoir marqué le monde de l’automobile.
Audi Sport
En perte de vitesse, Audi se retire du championnat à l’aube des années 1990, et concentre ses efforts sur le DTM (Deutsche Tourenwagen Masters) le championnat allemand de voitures de tourisme) que le constructeur remporte en 1990 et 1991.
… mais ce ceci est un autre histoire.
Puis, en 1999, Audi lance un programme pour les 24 Heures du Mans et l’endurance en partenariat avec le team Joest Racing. La première participation est satisfaisante : 3e et 4e position. Puis Audi revient en 2000 avec une voiture modifiée, le prototype LMP1 R8.
… mais ce ceci est un autre histoire.
Source et images :
Audi Sport
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