Partager la publication "Ford Model T : de la mécanique de l’entrepreneur Henry Ford à une révolution industrielle"
Henry fréquente l’école jusqu’à l’âge de 15 ans. Il n’éprouve que peu d’intérêt pour ses études et se révèle piètre élève ; d’ailleurs, il n’apprendra jamais à orthographier ni à lire correctement, et ne s’exprimera toujours que de la manière la plus simple.
Henry Ford, le mécanicien de la famille
S’il n’aime guère plus la vie agricole, Henry Ford se passionne en revanche très tôt pour la mécanique. À l’âge de 12 ans, il reçoit une montre de poche de son père qu’il parvient à démonter et remonter de nombreuses fois, gagnant une réputation de réparateur de montres auprès de ses voisins et amis.
Selon Henry, « une immense quantité de savoir peut être acquise simplement en bricolant des choses. La manière dont tout est fabriqué ne peut pas uniquement s’apprendre des livres ».
‘By the time I was fifteen I could do almost anything in watch repairing—although my tools were of the crudest. There is an immense amount to be learned simply by tinkering with things. It is not possible to learn from books how everything is made—and a real mechanic ought to know how nearly everything is made. Machines are to a mechanic what books are to a writer. He gets ideas from them, and if he has any brains he will apply those ideas.’ - Henry Ford, Samuel Crowther, My Life and Work, Garden City, New York, Garden City Publishing Company, 1922
Par la suite, Henry Ford passe le plus clair de son temps dans un atelier qu’il équipe lui-même et où il construit, à l’âge de 15 ans, sa première machine à vapeur.
Malgré les besoins de l’exploitation agricole familiale, Henry Ford, à l’âge de 16 ans, est autorisé par ses parents à partir travailler à Détroit ; il y est notamment employé comme apprenti dans un atelier d’usinage de fer.
Après trois années passées à Détroit, Ford retourne travailler à la ferme. C’est à cette période qu’il fabrique pour Westinghouse – une entreprise de location et de réparation de moteurs – une petite machine agricole à vapeur, dont le châssis et une partie du moteur sont issus d’une vieille tondeuse à gazon.
Henry Ford, l’inventeur
Commençant leur carrière professionnelle à la Murphy Engine Company, en 1886, deux frères John et Horace Dodge font ensuite fortune dans la production de bicyclettes, à la tête de leur company Evans & Dodge Bicycle Company
Des années plus tard, Henry Ford fait la rencontre de Clara Bryant, la fille d’un fermier du comté de Wayne. Ils se marient en avril 1888 et donnent naissance à un fils dénommé Edsel Ford, le 6 novembre 1893.
En 1891, Ford retourne à Détroit, accompagné de sa famille, en tant qu’ingénieur mécanicien chez Edison Illuminating Company. Devenu ingénieur en chef en 1893, il a suffisamment de temps et d’argent pour se consacrer à quelques expériences personnelles sur les moteurs à essence.
Ses expériences aboutissent en 1896 avec l’achèvement de son propre véhicule automobile nommé ‘Ford Quadricycle’, un véhicule de 4 chevaux à 4 roues refroidi par eau.
La même année, lors d’une convention tenue à Manhattan Beach, à New York, destinée à trouver des investisseurs, Ford est présenté à Thomas Edison, expliquant que « ce jeune homme venait de mettre au point une petite automobile à essence ». Après lui avoir posé quelques questions, Edison finit par déclarer :
‘Young man, that’s the thing! You have it! Your car is self contained and carries its own power plant.’ - Thomas Edison, Founder of General Electric
Encouragé par cette approbation, Ford démissionne de la société Edison Illuminating Company.
Henry Ford, l’entrepreneur
Pendant ce temps là, au cours du 19ème siècle, la ville de Détroit connaît un essor important et les colons qui partent pour la Conquête de l’Ouest y achètent les chariots nécessaires à leur voyage. Les négociants de bois et les fabricants de chariots y font fortune
William H. Murphy et Lemuel W. Bowen décident de se lancer dans la construction automobile en 1899 et fondent la Detroit Automobile Company.
Une douzaine seulement de voitures ‘Detroit’ voient le jour en deux ans. En 1901, Murphy et Bowen décident d’améliorer leur voiture et recrutent pour cela le jeune Henry Ford.
La société est alors réorganisée et devient la Henry Ford Company.
Pour se faire connaître, Ford fait preuve d’imagination. En octobre 1901, avec l’aide de son associé Childe Harold Wills, il participe à une course de 10 miles sur le circuit de Grosse-Pointe au volant d’une automobile de compétition qu’il a conçue, la Ford 999. Henry Ford la remporte devant Alexander Winton, un coureur réputé. Grâce à cette victoire largement diffusée dans la presse, Ford se fait connaitre à travers tous les États-Unis.
En 1901, les deux frères Dodge déplacent leur usine de bicyclettes et de machines à Détroit dans le Michigan. Ils y fabriquent des roulements et d’autres pièces pour les premières industries automobiles.
Plus tard, Henry Ford démissionne de la société Henry Ford Company, ses vues de l’automobile ne correspondant pas avec celles de Murphy…
En effet, en 1902, Ford est en profond désaccord avec plusieurs actionnaires de l’entreprise ; ces derniers désirent mettre sur le marché dès à présent une voiture de tourisme tandis que Ford insiste encore et toujours pour poursuivre l’amélioration de l’automobile sur laquelle il travaille. Ford décide donc de quitter la Henry Ford Company.
Murphy et Bowen décident alors de liquider la société et demandent à Henry M. Leland, le patron de la société L&F, de procéder à l’inventaire de l’usine. Mais Leland les persuade de continuer et il leur propose de procéder à un réoutillage complet de leur usine pour construire une nouvelle voiture équipée du moteur de sa société que l’ingénieur Alanson P. Brush est en train d’améliorer.
Le 22 août 1902, Leland, Murphy, Bowen et leurs associés Clarence A. Black et A. E. F. White, se réunissent pour définir les statuts de la nouvelle société et pour en choisir le nouveau nom. Dans l’enthousiasme des commémorations du bicentenaire de la fondation de la ville de Détroit, ils choisissent de baptiser leur firme ‘Cadillac’, du nom du fondateur de la ville, le français Antoine de Lamothe-Cadillac, le fondateur en 1701 de la ville de Détroit, auquel ils empruntent également les armoiries pour en faire le symbole de la nouvelle marque fondé à Détroit, dans l’État du Michigan.
Henry Ford, la success story
Peu de temps après son départ, Henry Ford propose à Alexander Malcomson, une connaissance rencontrée lorsqu’il était employé chez Edison, de participer à la création d’une nouvelle entreprise de fabrication d’automobiles. Malcomson accepte et ils fondent ensemble un partenariat dénommé Ford & Malcomson.
Leur premier modèle est la Ford A (T33), une petite berline de conception bon marché destinée à être vendue à environ $750.
En 1902, les frères John et Horace Dodge sont approchés par Henry Ford qui cherche de l’aide pour financer sa propre société de fabrication d’automobiles. Les frères Dodge aident donc Ford à financer son entreprise. Ils deviennent les premiers actionnaires et constructeurs des moteurs de la Ford Motor Company.
Ford et Malcomson se mettent d’accord pour vendre une partie de leurs parts de l’entreprise. Henry Ford donne cinquante actions à chacun des deux frères Dodge.
Les commandes n’affluant pas, l’entreprise Ford & Malcomson se retrouve rapidement en difficulté et n’est pas en mesure de payer les frères Dodge.
Malcomson se tourne alors vers John S. Gray, le président de la banque germano-américaine de Detroit. Gray investit $10500 dans leur entreprise14. Malcomson convainc également quelques-uns de ses jeunes employés d’investir ; finalement, Malcomson récolte $28000.
Le 16 juin 1903, Ford & Malcomson, devient Ford Motor Company, entreprise dirigée par John S. Gray. Henry Ford, tout comme Malcomson, possède alors 25,5% des parts de la nouvelle organisation en tant que vice-président ; il en deviendra président en 1906.
John Simpson Gray (October 15, 1841 – July 6, 1906) was a candymaker, business man, and banker from Detroit. He was also an original investor in (and the first president of) the Ford Motor Company.
Gray was still president of Ford Motor Company when Malcomson sold his shares. However, on July 6, 1906, John S. Gray died unexpectedly of heart trouble.
Gray’s position as Ford president was taken over by Henry Ford himself soon afterward.
Comme logo, une forme plus élaborée de l’écriture de ‘Ford Motor Company’ apparaît, avec un ‘F’ et un ‘D’ plus allongés. Connue sous le nom de « Scripte avec des ailes », cette typographie est alors utilisée sur toutes les voitures Ford jusqu’en 1910.
La nouvelle entreprise est cette fois-ci une réussite.
$100000 de profit sont réalisés les six premiers mois et $250000 sur l’année. Pour accroître leurs profits, Malcomson souhaite investir le marché des automobiles de luxe, le segment automobile le plus porteur selon lui ; Ford est récalcitrant mais doit finalement se résigner à accepter. Les Ford Modèle B et Modèle K vont ainsi voir le jour ; les clients sont au rendez-vous si bien qu’en 1907, les profits excèdent le million de dollars.
1911. Création du premier « ovale bleu » en associant la signature à un dessin ovale. Il est d’abord utilisé pour identifier les concessionnaires britanniques.
1912. Ford remplace le design ovale par le triangle ailé. Symbolisant vitesse, légèreté, stabilité et robustesse, le logo est disponible alors en bleu foncé ou orange et porte l’inscription « la voiture universelle ».
Depuis la fondation de sa société, Henry Ford avait produit et mis au point plusieurs modèles et prototypes de voitures. La première avait été dénommée modèle A et la dernière modèle T, mais plusieurs des dix-neuf modèles produits jusqu’à la Ford T n’étaient que des prototypes. La T succédait à la S, qui elle-même dérivait du modèle le plus vendu jusque-là, la N.
La Ford T (surnommée familièrement Tin Lizzie ou Flivver aux États-Unis) est une automobile fabriquée de 1908 à 1927 par la Ford Motor Company sous la direction de Henry Ford.
Design de la Ford T
Henry Ford a beaucoup innové lors de la fabrication du modèle T : assemblage à la chaîne, et non plus individuel et manuel, salaire proportionnel au prix de la voiture pour les ouvriers, afin qu’ils fournissent eux-mêmes un marché garanti.
The Model T was designed by Childe Harold Wills, and Hungarian immigrants Joseph A. Galamb and Eugene Farkas. Henry Love, C. J. Smith, Gus Degner and Peter E. Martin were also part of the team. Production of the Model T began in the third quarter of 1908.
Moteur de la Ford T
La Ford T est une propulsion, avec un moteur essence 4 cylindres en ligne produisant 20 ch.
The Model T had a front-mounted 177-cubic-inch (2.9 L) inline four-cylinder engine, producing 20 hp, for a top speed of 40–45 mph (64–72 km/h).
The engine was capable of running on gasoline, kerosene, or ethanol, although the decreasing cost of gasoline and the later introduction of Prohibition made ethanol an impractical fuel for most users.
Henry Ford designed the famed Model T Ford to run on alcohol — he said it was « the fuel of the future ». The oil companies thought otherwise, however — but the oil crisis of the early 1970s gave ethanol fuel a new lease of life.
La transmission est contrôlée par trois pédales au sol, un levier monté à la gauche du siège conducteur et deux leviers au volant à gauche et à droite. L’accélérateur est un levier, à droite du volant. En enfonçant la pédale de gauche, on enclenche le premier rapport dit « court ». En la remontant, on passe en seconde, rapport « long ». En la ramenant en position centrale, la voiture est au point mort, ce qui peut aussi s’obtenir en tirant le levier de gauche. La voiture peut rouler à vitesse constante sans que le conducteur n’appuie sur aucune pédale, l’accélérateur étant commandé à main droite. Il n’y a pas d’embrayage, ce qui fait de la « T » l’ancêtre des véhicules à boîte automatique.
Business de la Ford T
La première Ford T de série sort de l’usine Piquette à Détroit le 27 septembre 1908.
L’usine Ford de Piquette ne pouvait pas suivre la demande, et seulement onze voitures furent construites durant le premier mois de construction. En 1910, après avoir assemblé 120 000 Ford T, Henry Ford déplaça la société vers le nouveau complexe de Highland park. Là, la Ford T fut la première voiture construite à la chaine avec des pièces complètement interchangeables d’un exemplaire à l’autre.
La Ford T fut initialement proposée à un prix de 850 dollars, alors que peu de modèles étaient disponibles à moins de 2 000. Vers la fin des années 1920, le prix était tombé à 300 dollars (ce qui équivaudrait à environ 3 300 dollars actuels) en raison des économies d’échelle et du perfectionnement de la chaine de production. Henry Ford procéda à une concentration verticale des industries nécessaires à la production de ses voitures.
« L’homme qui place une pièce ne la fixe pas, l’homme qui place un boulon ne met pas l’écrou et l’homme qui place l’écrou ne le visse pas »
Lorsqu’en 1913, Ford introduit le déplacement des pièces sur des convoyeurs, le temps de montage du châssis de la Ford T passe de 728 min à 93 min.
Henry Ford imagine sa première ligne d’assemblage mobile et révolutionne les procédés de fabrication avec la Ford T. Ainsi, la première usine Ford implantée à Highland Park, dans le Michigan, devient la référence en matière de systèmes de production en grande série pour le monde entier.
… It was a collective effort primarily by Peter E. Martin, the factory superintendent Charles E. Sorensen, Martin’s assistant; C. Harold Wills, a draftsman and toolmaker; and Clarence W. Avery and Charles Lewis, first line supervisors. … - Egonomics: What Makes Ego Our Greatest Asset (Or Most Expensive Liability)
Début d’une révolution industrielle
L’intention d’Henry Ford est clairement de produire le plus grand nombre de véhicules, de conception raisonnable, à un coût le plus bas possible. A cette époque, la possession d’une voiture est le privilège de quelques-uns. L’objectif d’Henry Ford est de « mettre le monde sur des roues » et produire un véhicule accessible au plus grand nombre.
Dans les premiers temps, Ford construit des automobiles de la même manière que ses concurrents de l’époque, une à une, comme d’autres construisent des maisons. Pendant tout l’assemblage, le véhicule reste sur place tandis que les mécaniciens et leurs aides vont chercher les composants, reviennent vers la voiture en chantier et fixent ces sous-ensembles sur le châssis. Un peu plus tard, les voitures sont assemblées sur des plates-formes que l’on fait avancer d’un groupe de travail à l’autre. Cette approche accélère quelque peu la méthode d’assemblage mais Ford continue à avoir besoin de main-d’œuvre qualifiée pour construire « à la main ».
Les niveaux de production sont donc relativement peu modestes et le prix des voitures reste élevé pour couvrir les coûts de personnel.
La première étape vers l’automation date du moment quand Henry Ford et ses ingénieurs inventent des machines capables de produire de grandes quantités de pièces. Ils conçoivent également des méthodes d’assemblage rapides.
L’esprit d’innovation s’applique également au système de transport par gravité et par convoyage. L’implantation du personnel et des outils font l’objet d’études méticuleuses pour assurer la ligne de production sans heurt.
Au sein de chaque département, le mode opératoire est décomposé en unités spécifiques. L’allure de production s’accélère, parfois même quadruple. Les lignes affectées aux sous-ensembles sont créées dans toutes les activités de production car – comme le remarque Henry Ford – « dans l’usine, tout est en mouvement « .
Création de la ligne d’assemblage finale
Le point d’arrivée est atteint par la création de la ligne d’assemblage finale. Le châssis dénudé est déplacé tout au long de la ligne, s’arrêtant à chaque poste de travail jusqu’à ce que la voiture quitte l’atelier grâce à son moteur. L’approvisionnement en pièces et sous-ensembles est synchronisé pour fournir les bonnes pièces au bon moment.
En associant la précision, continuité et vitesse, la production en grande série vient de naître. A l’usine d’Highland Park, la Ford T bat des records d’efficacité quand le chronomètre mesure qu’une voiture terminée est produite toutes les 10 secondes de jours ouvrables. Ford est alors capable de réduire les prix de vente, doubler le salaire minimum quotidien qui atteint 5 dollars. Ford permet ainsi à ses ouvriers de pouvoir eux aussi prétendre à l’achat d’une automobile.
A cette époque, deux millions de la Ford T sont produites chaque année et proposées au public à 260 dollars.
La Ford T lance une révolution rurale. Les 5 dollars de salaire quotidien et toute la philosophie sur laquelle Henry Ford s’appuie, engendrent une révolution sociale. La ligne d’assemblage mobile provoque une révolution industrielle.
Dans son autobiographie, ‘My Life is Work and work is life’, parue aux États-Unis en 1922, Henry Ford révèle que son idée de la chaîne de production nait après une visite, adolescent, d’un abattoir de Chicago. Les origines des chaînes de production seraient à situer non pas dans l’industrie automobile, mais dans celle de la viande, au sein des grands abattoirs Union Stock Yards.
Une voiture Ford T est composée d’environ cinq mille pièces, en comptant les vis, les boulons, etc. Quelques-unes de ces pièces sont assez volumineuses et d’autres presque aussi petites que celles d’une montre. Notre première manière de faire l’assemblage consistait à monter notre voiture sur place, les ouvriers apportant les pièces au fur et à mesure qu’il en était besoin, comme quand on construit une maison. Quand nous nous mîmes à fabriquer des pièces, il fut naturel d’assigner une section particulière de l’usine à la fabrication de chacune, mais en général un seul ouvrier faisait toutes les opérations exigées par une petite pièce.
L’augmentation rapide de la production nous obligea à imaginer un système pour éviter que les ouvriers ne se gênassent mutuellement. Les travailleurs mal dirigés passent plus de temps à courir après les matériaux ou les outils qu’à travailler, et ils touchent un faible salaire, parce que la marche à pied n’est pas une occupation rémunératrice.
Notre premier progrès dans l’assemblage consista à apporter le travail à l’ouvrier, au lieu d’amener l’ouvrier au travail. Aujourd’hui, toutes nos opérations s’inspirent de ces deux principes. Nul homme ne doit avoir plus d’un pas à faire ; autant que possible, nul homme ne doit avoir à se baisser.
En avril 1913, nous tentâmes pour la première fois l’expérience d’un réseau d’assemblage. Nous essayâmes d’assembler la magnéto à volant. Tous nos essais se font d’abord en petit. Nous bouleversons tout, s’il le faut, une fois que nous avons trouvé un meilleur système, mais nous ne prenons cette mesure radicale que lorsque nous nous sommes parfaitement convaincus de la supériorité de la nouvelle manière de procéder sur l’ancienne. Je crois que ce fut le premier réseau qu’on ait jamais installé.
L’idée générale en fut empruntée au trolley des fabricants de conserves de Chicago. Jusqu’alors nous avions assemblé la magnéto à volant selon la méthode ordinaire. Un ouvrier faisant toutes les opérations de ce montage pouvait assembler trente-cinq ou quarante appareils dans une journée de neuf heures, ce qui faisait environ vingt-cinq minutes par assemblage. Ce qu’il faisait seul fut alors réparti entre vingt-neuf ouvriers, ce qui réduisit l’assemblage à treize minutes dix secondes. Puis nous élevâmes la hauteur du réseau de huit pouces, (c’était en 1914) et réduisîmes le temps à sept minutes. De nouvelles expériences sur la vitesse du mouvement réduisirent le temps à cinq minutes.
En résumé, voici le résultat : grâce à cette étude méthodique un seul homme est aujourd’hui en mesure de faire un peu plus de quatre fois l’ouvrage qu’il faisait il n’y a pas beaucoup d’années. Ce réseau établit l’efficacité de la méthode et aujourd’hui nous l’employons partout. L’assemblage du moteur, opéré autrefois par un seul homme, est maintenant divisé entre quatre-vingt-quatre, et ceux-ci font le travail qui exigeait le triple de leur nombre.Peu de temps après nous fîmes l’essai du système sur le châssis. Ce que nous avions pu faire de mieux jusqu’alors avait été d’assembler le châssis dans une moyenne de douze heures vingt-huit minutes. Nous fîmes l’expérience de le traîner au moyen d’un câble et d’un rouleau le long d’un réseau d’assemblage de deux-cent-cinquante pieds de longueur. Six assembleurs voyageaient avec le châssis et prenaient les pièces à des tas placés le long du réseau. Cette expérience grossière réduisit le temps à cinq heures cinquante minutes par châssis. Au début de 1914, nous élevâmes le réseau. Nous avions adopté ce principe du « travail à hauteur d’homme ». Nous avions un réseau à vingt-six pouces trois quarts, et un autre à vingt-quatre pouces et demi du sol, pour des équipes de tailles différentes. Cette installation à hauteur de main et une subdivision plus poussée du travail, diminuant le nombre des mouvements à faire, réduisit la main-d’œuvre par châssis à une heure trente-trois minutes. (…)
Il ne faudrait pas s’imaginer cependant que tout cela se fit aussi vite que je le décris. La vitesse du mouvement dut faire l objet d’expériences minutieuses. Pour la magnéto à volant nous eûmes d’abord une vitesse de soixante pouces par minute. C’était trop vite. Nous essayâmes ensuite dix-huit pouces : ce fut trop lent. Finalement nous nous arrêtâmes à vingt-quatre pouces par minute. Le principe est que l’homme ne doit pas être contraint à la précipitation : il ne doit pas avoir une seconde de moins qu’il ne lui faut, ni une seconde de plus. (…)
L’assemblage du châssis comprend quarante cinq opérations ou stades différents. Les premiers ouvrier fixent quatre supports de pare-boue au corps du châssis. A la dixième opération, c’est le moteur qui arrive, et ainsi de suite. Quelques ouvriers ne font qu’une ou deux petite opérations, d’autres en font davantage. L’homme qui place une pièce ne la fixe pas : la pièce peut n’être complètement fixée qu’après l’intervention de plusieurs ouvriers L’homme qui place un boulon ne met pas l’écrou. L’homme qui place l’écrou ne le visse pas. Au trente-quatrième stade, le moteur reçoit sa gazoline. Il a préalablement été graissé ; au numéro quarante-quatre le radiateur est rempli d’eau, et au quarante-cinquième et dernier stade la voiture s’en va et roule dans John R. Street.
Ce sont essentiellement les mêmes principes qui ont été appliqués à l’assemblage du moteur. En octobre 1913, il fallait neuf heures cinquante-quatre minutes poux assembler un moteur. Six mois plus tard, par l’assemblage mouvant, ce temps avait été réduit à cinq heure cinquante-six minutes.
Extrait de Ma vie et mon oeuvre parait en 1922 en anglais sous le titre de My Life and Work grâce à la collaboration du rédacteur Samuel Crowther. En français, le livre a été édité par les éditions Payot. Il a été écrit avec Victor Cambon et paru le 10 juin 1925. (via henryford.fr)
Henry Ford, le Fordisme
En 1914, Ford produisit plus de voitures que tous les autres constructeurs réunis. Lorsque la dix-millionième Ford T fut produite, neuf voitures sur dix dans le monde entier étaient des Ford.
Henry Ford doit notamment ce succès à un mode de développement inspiré du taylorisme basé sur la rationalisation et la standardisation. La rationalisation, ou plus simplement la décomposition de l’activité de l’ouvrier en tâches élémentaires lui permettant de travailler sur des machines-outils spécialisées, conduit à une simplification et une normalisation des gestes ainsi qu’une augmentation conséquente de la productivité.
…Ce qui est dénommé le Fordisme, relayé plus tard par les Keynésiens de l’école de pensée économique fondée par l’économiste britannique John Maynard Keynes.
Le keynésianisme est l’une des plus importantes théories macroéconomiques. Il désigne la doctrine développée par John Maynard Keynes, notamment dans la « Théorie générale de l’emploi, de l’intérêt et de la monnaie ». Keynes y défend l’hypothèse que la demande est le facteur déterminant qui permet d’expliquer le niveau de la production et par conséquent de l’emploi.
« le Fordisme est le terme par lequel on désigne l’ensemble des procédures (explicites ou implicites) par lesquelles les salaires se sont progressivement indexés sur les gains de productivité. Augmenter régulièrement les salaires au rythme des gains de productivité permet d’assurer que les débouchés offerts aux entreprises croîtront également au même rythme et permettront donc d’éviter la surproduction. »
Comme le perçoit bien Henry Ford …qui voulait que ses ouvriers fussent bien payés, pour leur permettre d’acheter les voitures qu’ils avaient eux-mêmes produites.
Les conséquences du Fordisme sont une hausse de la production et de la productivité, mais aussi de la consommation, une baisse du coût de production (par une économie de main-d’œuvre et de surface), une dé-qualification du travail ouvrier, un meilleur contrôle par la direction du travail ouvrier, la réalisation d’un travail ouvrier de plus en plus répétitif et monotone, et une standardisation de la production dans le but de favoriser une consommation de masse.
Edsel Ford, l’héritier
Henry Ford cède la présidence de Ford Motor Company à son fils Edsel Ford en décembre 1918 ; âgé de 55 ans, il conserve toutefois un pouvoir discrétionnaire. Interrogé sur le devenir de la Ford Motor Company, Ford répondait que s’il n’était pas le maître de sa propre entreprise, il en construirait une autre. C’est ainsi qu’en juillet 1919, il rachète l’ensemble des parts, pour un montant de près de 106 millions de dollars, qu’il partage avec les membres de sa famille.
Au milieu des années 1920, les ventes du modèle T commencent à décliner en raison de l’augmentation de la concurrence.
D’autres marques automobiles offrent à leurs clients la possibilité d’acquérir une automobile à crédit, ce que Ford a toujours refusé, avec de meilleures prestations et un style plus moderne que le modèle T.
En dépit des demandes de son fils Edsel Ford, Henry refuse toujours d’intégrer de nouvelles fonctionnalités au modèle T ou toute forme de plan de crédit client.
Me déclin de la Ford T s’explique également par des raisons sociales et commerciales : d’une part, les ouvriers se lassent d’un travail jugé peu valorisant, et d’autre part, l’élévation générale du niveau de vie permet aux autres constructeurs de miser sur la segmentation du marché. Les clients sont en effet de plus en plus soucieux de se distinguer socialement par leur automobile et de disposer d’une voiture confortable. Posséder une Ford T n’est plus aussi valorisant et conduit les clients à renouveler leur voiture en se portant vers des marques plus prestigieuses.
Finalement, plus de 15 millions furent produites, record de production pour un seul modèle qui ne fut battu que par la Volkswagen Coccinelle qui dépassa les 21 millions. Certes, il y eut 31 millions de Toyota Corolla et 25 millions de Volkswagen Golf, mais dans les deux cas il s’agit de la somme de plusieurs modèles successifs dont les évolutions sont étalées sur plusieurs décennies.
À cause de l’approche excentrique de Henry Ford, le modèle fut peu modifié au cours de son cycle de vie : il croyait que la T était exactement la voiture dont quiconque aurait jamais besoin. Au fur et à mesure que d’autres compagnies offrirent des véhicules supérieurs sur certains aspects à des prix compétitifs, la T perdit des parts de marché. Finalement, le 31 mai 1927, Ford cessa sa production et se lança dans la fabrication du modèle Ford A.
Ford
En 1926, Henry Ford est finalement convaincu qu’il faut développer un nouveau modèle. Il suit le projet avec beaucoup d’intérêt pour la conception du moteur, du châssis, de la mécanique et d’autres aspects, tout en laissant le gros de la conception à son fils unique Edsel Ford.
1927. Le nouveau Model A en 1927 est la première voiture à arborer le logo Ford sur son capot. Il est apposé sur un grand nombre de véhicules jusqu’à maintenant.
C’est en 1976 que le logo Ford prend sa forme actuelle, même s’il a subi quelques rafraîchissements, notamment en 2003, à l’occasion du centenaire de la création de la Ford Motor Company.
Source et images :
Ford
==> Ford GT40 de la victoire – 24H du Mans 1966 – orchestrée par Henry & Bruce & Carroll vs Enzo
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